INTERSEXUALITE

• Intersexualité : possession à la fois de caractéristiques mâles et femelles


• Le terme hermaphrodisme est ici utilisé dans son sens strict : individu génétiquement mâle OU femelle et présentant des gonades mâles ET des gonades femelles ou au moins une gonade mixte (ovotestis).


• Pseudohermaphrodisme : qualité d’un individu présentant des discordances entre son sexe génétique, son sexe gonadique, son sexe génital (tractus génital) et son sexe phénotypique. Le « pseudohermaphrodisme mâle» caractérise l’individu par la présence de testicules et une ou plusieurs caractéristiques femelles et inversement pour le « pseudohermaphrodisme femelle». Lorsque les gonades sont indifférenciées, on qualifiera de mâles les individus avec un appareil génital externe mâle et femelles les individus avec un appareil génital externe femelle.


• Freemartin : individu identifié à la naissance comme femelle au vu de son appareil reproducteur externe, possédant un chimérisme sexuel (XX/XY) et des caractères phénotypiques mâles. Les gonades peuvent être de type mâle (gonades pseudo-testiculaires) ou de type indifférencié. Les individus de cette catégorie peuvent être qualifiés d’hermaphrodites ou pseudohermaphrodites selon la qualité de leurs gonades.

Epidémiologie – Symptômes – Lésions – Diagnostic -
Conduite à tenir – Prophylaxie – Bibliographie

Epidémiologie
ETIOLOGIE ET PATHOGENIE:

~ Free martinisme ~

• Cela arrive lorsque s’effectue une connexion vasculaire entre les placentas de deux jumeaux de sexe différent, connexion qui aboutit à la naissance d’une femelle stérile avec des caractères sexuels mâles et un mâle fertile. Cette anastomose vasculaire a lieu très tôt dans la vie embryonnaire.


• Cette connexion vasculaire facilite l’échange de cellules hématopoïétiques mâles et femelles et d’hormones d’origine testiculaire.


• Il semblerait que le chimérisme leucocytaire rencontré chez les ovins ait une origine génétique. En effet l’anastomose vasculaire placentaire est plus fréquente dans certaines lignées que dans d’autres. La transmission de ce caractère est assez difficilement étudiable du fait de l’impossibilité d’identifier les anastomoses entre jumeaux de même sexe, elle apparaît néanmoins contrôlée par un seul gène dominant.


• Ce sont les hormones sécrétées par le co-jumeau qui induisent la masculinisation de l’appareil génital et de la gonade femelle :
  • Les dérivés des canaux de Müller sont inhibés par l’hormone anti-müllérienne.
  • Les dérivés des canaux de Wolff et l’appareil génital externe sont stimulés par la testostérone du co-jumeau.
  • La différenciation des gonades passe par deux stades : tout d’abord une phase d’inhibition du cortex ovarien puis une phase de masculinisation (formation des cordons séminifères)

~ Hermaphrodisme ~

• Il s’agit probablement d’une anomalie lors de la fécondation ou de la croissance embryonnaire, cependant le mécanisme n’est pas totalement élucidé.

~ Pseudohermaphrodisme ~

• Le cas le plus connu est l’intervention du gène motte. On parle aussi d’inversion sexuelle.
  • La mutation PIS (polled intersex syndrome) touche à la fois les mâles et les femelles mais seules les femelles subissent une inversion sexuelle.
  • Il s’agit d’une délétion affectant l’expression de deux gènes PISRT1 et FOXL2 permettant la différenciation ovarienne.
  • La transmission de cette pathologie est récessive.
  
  
• Une mutation génétique sur le chromosome Y ou l’absence d’une séquence de gène pourrait être à l’origine d’un manque de masculinisation de l’animal notamment concernant les attributs sexuels secondaires (ce qui entraîne la présence d’une vulve et d’un vagin)


• Une déficience en hormone antimüllérienne ou en récepteurs de cette hormone a été suspectée dans un cas de bouc à pseudohermaphrodisme mâle.

INCIDENCE – PREVALENCE:

~ Free martinisme ~

• L’incidence a été estimée à environ 1% chez les ovins, le risque augmente avec les performances de la prolificité des races. Cela représente 1,2 à 7% des naissances multiples mixtes. Les naissances doubles et triples sont moins touchées que les naissances de quadruplés ou quintuplés.


• Il ne s’agit pas de la forme la plus courante d’hermaphrodisme chez les caprins, elle représenterait néanmoins 4,8 à 5% des cas d’infertilité chez la chèvre (selon Szatkowska et al. 2004). Cette pathologie est peu courante dans l’espèce caprine car chez cette dernière, les anastomoses vasculaires placentaires sont plus rares.

~ Hermaphrodisme ~

• o Aucune donnée bibliographique n’a clairement établi la prévalence ou l’incidence de cette pathologie.

~ Pseudohermaphrodisme ~

• L’inversion sexuelle mettant en cause le gène PIS n’est pas rare dans certains troupeaux où l’absence de corne est recherchée.

Symptômes et altérations comportementales

~ Free martinisme ~

• La femelle n’entre pas en chaleur à la puberté, aucun cycle oestral ne débute.


• Certaines présentent des comportements typiquement mâles. Elles entreprennent les rituels mâles de l’accouplement : reniflements vulvaires de femelles en oestrus, grattage du sol avec les antérieurs, signe de Flehmen et chevauchement. D’autres montrent des signes d’agressivité vis-à-vis de mâles entiers.


• La fertilité du mâle jumeau peut éventuellement être altérée.
  

~ Hermaphrodisme ~

• Lorsque cette pathologie touche une femelle, il n’est pas rare qu’elle entre en oestrus mais que la conception ne soit pas possible.


• Le comportement sexuel peut-être de même nature que le sexe phénotypique de l’animal ou opposé.

~ Pseudohermaphrodisme ~

• Le « pseudohermaphrodisme mâle» chez les caprins
  • Malgré son âge adulte, aucune chaleur n’est détectée sur les individus identifiés à la naissance comme femelle.
  • La présence de testicules produisant des hormones mâles a pour conséquences une libido et un comportement de mâle en présence de femelles en chaleur ou de boucs entiers.
  
  
• Les femelles pseudohermaphrodites (gonade indifférenciée et appareil génital externe femelle) ne présentent pas non plus d’oestrus, mais n’ont pas nécessairement de comportement mâle du fait de la non-différenciation de leurs gonades.
  

Lésions et altérations morphologiques

~ Free martinisme ~

• Les modifications opèrent sur trois attributs : l’appareil génital externe, l’appareil génital interne et la morphologie générale. Les caractéristiques peuvent aller d’intégralement femelle à intégralement mâle pour chaque attribut. Cette masculinisation semble dépendre du stade de la gestation durant lequel l’anastomose a eu lieu.


• Les gonades :
  • Dans les cas extrêmes mais parmi les plus fréquents (60 à 65% (selon biblio Smith et al 2003), les gonades des freemartins sont similaires à des testicules et ont une position inguinale ou abdominale basse. Malgré leur position inguinale, elles restent horizontales dans un repli de peau.
  • Le parenchyme des gonades pseudo-testiculaires est homogène à l’échographie, avec une ligne hyperéchogène correspondant au mediastinum testis.
  • Les gonades pseudo-testiculaires sont constituées des mêmes cellules qu’un testicule. Leurs tubes séminifères ne possèdent qu’une seule couche de cellules basales similaires à des cellules de Sertoli, aucune cellule germinale n’est visible, dans le tissu interstitiel on retrouve des cellules ayant les caractéristiques des cellules de Leydig.
  • Le tissu testiculaire peut apparaître dégénéré dans les diagnostics tardifs à cause de la chaleur émise par le corps. Les gonades ressemblent alors à des testicules cryptorchides.
  • Dans d’autres cas, les gonades présentes ont une forme rudimentaire indifférenciée. Le stroma de ces gonades est principalement amorphe.
  • Certains individus sont pourvus d’ovotestis, gonades combinant à la fois du tissu testiculaire et du tissu ovarien, ces gonades sont bien souvent plus petites que les testicules et en région abdominale non loin de la position normale des ovaires.
  • Enfin, chez les caprins principalement, on observe des ovaires, il est donc probable que, dans la majorité des cas de naissances gémellaires, les anastomoses vasculaires ne s’installent pas du tout ou du moins s’installent après la période critique de différenciation de la gonade.
  
  
• L’aspect de la vulve est variable d’un individu à l’autre, elle est en générale petite mais peut être distendue par un clitoris surdimensionné.


• Le vagin est plus court que chez des individus normaux (dont la moyenne oscille entre 10 et 14cm), sa longueur peut varier de 3,1 à 7,0cm (biblio SMITH et al, 2000).


• L’utérus et son col ne sont pas toujours présents, ils peuvent parfois exister à l’état rudimentaire.


• Certains freemartins possèdent des vésicules séminales rudimentaires. Un épididyme peut être présent à l’état rudimentaire, de même pour le vas deferens et le plexus pampiniforme.


• Il n’est pas rare que les trayons des freemartins soient plus courts que des trayons de femelle normale.


• La morphologie de la femelle peut aussi être touchée, on note alors la présence de cornes, une odeur forte de mâle, une stature plus imposante.

~ Hermaphrodisme ~

• On peut observer différentes formes : présence d’un ovaire et d’un testicule plus ou moins fonctionnels, présence d’un ou de deux ovotestis. Ramadan et al (1988) ont proposé une classification : l’hermaphrodisme bilatéral correspond à la présence de deux ovotestis, l’unilatéral à la présence d’un ovotestis, le latéral à la présence d’un testicule et un ovaire.


• L’ovotestis présente à la fois du tissu ovarien et du tissu testiculaire, des cellules de Sertoli sont identifiables, de même que des cellules de Leydig.


• L’orifice génital à la naissance a une position particulière, on peut le retrouver à mi chemin entre la mamelle et l’anus ou dans la région scrotale. Cet orifice ne ressemble à aucun orifice normal mâle ou femelle.


• Des vestiges des canaux müllériens et wolffiens sont présents.
  

~ Pseudohermaphrodisme ~

• Le « pseudohermaphrodisme mâle » chez les caprins

	Identification sexuelle à la naissance
	mâle	femelle
morphologie générale	- présence d’un scrotum - présence de tissu mammaire possible	- aspect d’une femelle masculinisée, présence de cornes, - présence d’une barbiche, - mamelle juvénile
Appareil génital externe	- Penis de petite taille voire absence Hypospadias chez certains	- vulve en position normale - clitoris proéminent
Appareil génital interne	- Urètre anormal, faible développement - Voire cornes utérines	- Le vagin est de petite taille (de l’ordre de 3cm), aucun utérus n’est détectable
gonades	- présence de testicules	- Les testicules sont accompagnés d’un épididyme d’histologie normale, d’un vas deferens sans lumière. Le parenchyme testiculaire est semblable aux testicules hypoplasiques, constitué de tubes séminifères immatures et atrophiés avec des cellules de Sertoli mais aucune cellule germinale. Le tissu interstitiel est abondant.
sexe génétique	60, XX	60, XX

• Dans le cas du bouc pseudohermaphrodite, il y avait aussi présence de testicules. Ces dernières étaient en position abdominale (le motif de consultation était la cryptorchidie). Cet animal était exempt de scrotum, mais possédait un fourreau et un pénis de taille normale. Ses testicules étaient hypoplasiques, deux épididymes rudimentaires étaient présents ainsi qu’un utérus bicornes. Le pénis observait une courbure sigmoïde normale, les glandes vésiculaires et bulbourétrales étaient en position normale. Cet animal était génétiquement mâle (60, XY)


• Il n’est pas rare de trouver des femelles pseudohermaphrodites, elles n’ont de mâle qu’un clitoris de grande taille, mais lors de l’autopsie ou du passage à l’abattoir, on retrouve des gonades indifférenciées de très petite taille en position abdominale dans la zone classique de localisation des ovaires.
• Cas particuliers des individus « motte » :
  • le caractère « absence de corne » est étroitement associé à un autre, relatif aux capacités de reproduction, et qui s'exprime sous différents aspects:
    • intersexualité,
    • formes variées de stérilité chez les mâles,
    • décalage du sex-ratio en faveur des mâles,
    • surfécondité de certaines femelles
    
    
  • Le gène p ("polled") présente deux allèles :
    • pis+ récessif (allèle sauvage) gouverne la présence de cornes
    • pis- dominant (allèle muté) gouverne l'absence de cornes.
    
    

Formules chromosomiques	Génotypes
	PIS +/+	PIS +/-	PIS-/-
XY	- Mâles cornus fertiles	- Mâles mottes fertiles plus prolifiques que les mâles PIS +/+	- Mâles mottes fertiles plus prolifiques que les mâles PIS +/+ et +/- - Mâles atteints d’obstruction de l’épididyme partielle (fertiles) ou totale (stériles) due à une faible différenciation.
XX	- Femelles cornues fertiles	- Femelles mottes fertiles plus prolifiques que les mâles PIS +/+	- Animaux mottes tous stériles inversés sexuels : la moitié des cas sont mâles XX sans ambiguïté l’autre moitié sont des mâles XX avec ambiguïté génitale externe

• Chez les foetus femelles inversées sexuellement (PIS(-/-)) l'expression de CYP19 (gène de l'aromatase) est dès 36j post coït (36jpc) plus faible que chez les femelles témoins (PIS(+/+) ou (+/-)). A 40jpc, les ovaires présomptifs des femelles PIS(-/-) présentent déjà des différences significatives par rapport aux témoins marquées par une réduction du cortex ovarien et un développement des cordons séminifères.


• Il a été montré que la présence d'hormone anti müllérienne dans une gonade XX au moment où les cellules germinales devraient entrer en méiose est responsable de leur dégénérescence. Ici la mutation PIS(-/-) entraîne une production d'AMH par les cellules précurseurs de sertoli qui se différencient dans les cordons séminifères de cette gonade inversée donc la mort des cellules germinales femelles.

• Dans les cas de gynécomastie, les trayons des mâles sont plus larges que la normale, les quartiers mammaires sont développés souvent de manière asymétrique et produisent du lait.

Diagnostic
DIAGNOSTIC CLINIQUE

~ Free martinisme ~

• Le diagnostic peut se faire en mesurant la longueur du vagin, ce dernier écourté, mesure moins de 5cm de long chez la brebis et se termine par une extrémité aveugle sans col de l’utérus.

~ Hermaphrodisme ~

• Les organes sexuels externes sont très fréquemment normaux, il est donc très difficile, sans laparoscopie ou échographie de diagnostiquer un hermaphrodisme chez la femelle.

~ Pseudohermaphrodisme ~

• La présence d’un clitoris proéminant voire péniforme est un indice d’intersexualité chez la femelle.


• L’absence de corne chez une femelle infertile oriente fortement en faveur d’un diagnostic de pseudohermaphrodisme

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL :

PRELEVEMENTS POUR ANALYSES AU LABORATOIRE :

~ Free martinisme ~

• Un prélèvement de sang sur tube hépariné permet par caryotypage d’établir la présence d’une chimère XX/XY. (érythrocytes et lymphocytes)
• Sur des sérums, les concentrations hormonales en LH et en progestérone sont typiques des freemartins. Chez les ovins, la LH plasmatique est supérieure à 10ng/mL et celle de progestérone inférieure à 0,4ng/mL. Les taux de testostérone sont supérieurs à ceux des brebis normales mais peuvent être inférieurs ou bien supérieurs à ceux des mâles selon les études.

OVINS	TAUX PLASMATIQUE EN TESTOSTERONE (ng/mL)
	Kenny et al, 1992	Bosu et al, 1984
Freemartin	3,820	1,4-5,2
Mâle	4,830	0,4-2,8 (0,5-6,9)
Femelle	0,057	<0,2

• Chez les caprins, les taux plasmatiques en progestérone et en testostérone sont proches des valeurs mâles. A la différence des mâles et des femelles normaux, les freemartins ne sont pas cyclés, les taux restent constant durant la saison de reproduction et hors de cette saison.

taux plasmatiques de progestérone et de testostérone caprins


• Il semblerait que la sécrétion de testostérone n’est pas soumise à l’influence du système nerveux central.

~ Hermaphrodisme ~

• L’animal est génétiquement mâle ou femelle.


• Chez la femelle-hermaphrodite, le taux de testostérone est supérieur à celui d’une femelle fertile et répond à l’hCG par une augmentation.

Conduite à tenir

• Les animaux confirmés comme intersexués doivent être écartés de la reproduction.


• Les petits nés de gestations mixtes ne doivent pas être conservés dans la mesure du possible, les femelles risquent d’être infertiles, les mâles d’avoir une fertilité moindre.

Prophylaxie

• Le cas le plus simple à gérer, est d’éviter l’accouplement de deux caprins mottes afin d’éluder le risque de réversion sexuelle.


• On pourrait limiter la prolificité de certaines races et ainsi limiter ce facteur de risque mais cela va à l’encontre de certaines politiques d’élevage.


• Le mécanisme d’apparition de l’hermaphrodisme étant inconnu, aucune prophylaxie n’est envisageable.

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gestation gemellaire ovine avec connection placentaire

Hermaphrodisme ovin, clitoris péniforme

 
clitoris péniforme de chèvre